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Majid Blal, Sherbrooke le 3 décembre 2014
Pendant des années, les communautés musulmanes du Québec qui proviennent d’une multitude des pays musulmans, avaient apporté chacune dans ses balluchons un islam imprégné de coutumes locales, empreint des particularismes spécifiques aux cultures régionales et pétri par des milliers d’années de traditions singulières.
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La foi en un seul dieu et en son prophète ne peut affirmer que la vision de la religion et sa pratique sont monolithique, uniforme et homogène. D’où la réaliste constatation qui débouche sur la conclusion qu’il n y a pas une communauté de musulmans mais des communautés chacune avec son identité propre, son parcours migratoire propre et son Altérité singulière, personnelle. Si on y ajoute la multiplicité des courants qui ont crées à travers l’histoire des mouvements dissidents ou sectaires, cela ne peut qu’annoncer l’impossible harmonie entre Chiites, sunnites, Soufis, Salafistes, Takfiristes, wahhabites
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Des communautés musulmanes qui ont chacune leurs propres codes culturels et leurs propres clefs pour décrypter la compréhension et la pratique de la religion.
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L’influence des traditions locales, des us millénaires et des mentalités forgées dans des espaces tribaux et claniques bien précis et souvent compartimentés, cloisonnés et claustrés vers l’intérieur des austérités isolationnistes souvent impénétrables
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Tout ce monde se côtoyait en s’ignorant jusqu’au passage de l’Ouragan du 11 septembre et les tribunaux inquisitoires de l’après septembre dont l’apogée s’était cristallisé dans le feu d’artifice de la Charte des valeurs.
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N’ayant ni clergé ni autorités religieuses- Sauf chez les chiites- les communautés se guidaient ou s’autoguidaient elles mêmes en s’accrochant aux acquis et aux enseignements ancrés par la socialisation. Ce qui a motivé leur absence sur la place publique quand les médias avaient ouvert les ondes aux salafistes et aux plus radicaux tel l’Imam Jaziri à Montréal. La nature n’aimant pas le vide, les Martineau et consort avaient pris l’habitude de descendre en flammes tous les musulmans du Québec en allant jusqu’à les traiter de lâches puisqu’ils ne se manifestaient pas dans les débats publics.
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Puis soudain comme une nuée de sauterelles s’abattant sur les champs, les langues se sont déliées, sont sorties bien aiguisées sur les médias sociaux qui se sont avérées une bénédiction pour ceux qui étaient privés de parole. On aurait pu s’en réjouir, si l’exercice se limitait à permettre à chacun de dire son mot en son nom propre, dans le respect des mots des autres. Hélas dans les milieux tellement emmurés dans le silence, tout le monde haranguait pour se positionner en pasteur éclairé, en dirigeant, en guide, en leader, en dealer, en chef…
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Comme un printemps de prêcheurs, ils ont soudain fleuris comme des coquelicots sur la banquise.
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Le malheur c’est que chaque matin, il y a un gus qui sort de sa torpeur, qui se réveille de son hibernation, qui se découvre une illumination ou qui sort de sa cuite carabinée de la veille en se découvrant une nouvelle vocation de prédicateur.
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Y’en a des sincères qui sont convaincus que leurs interventions font partie de leur foi et sont un gage de leur quête du paradis. D’autres, sont juste dans l’écho, une sorte de réaction au misères que subissent d’autres musulmans ailleurs dans le monde
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Y’en a qui ne veulent pas céder tout le terrain aux Imams que personne n’a élu et qui parlent au nom de tous et cela depuis longtemps, marginalisant la société civile, les intellectuels, les artistes et les compétences qui auraient pu être de meilleurs médiateurs interculturels. Le danger est qu’ils bifurquent reproduisant ce qu’ils dénoncent en essayant de parler au nom de tous et non en leurs noms personnels.
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Y’en a d’autres et ils sont en augmentation exponentielle, qui s’improvisent représentant des communautés musulmanes et dans notre cas marocaine et qui se permettent de négocier en son nom sans son consentement.
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Il y a aussi des sectaires qui s’improvisent dépositaires du visa pour l’Islam. Sans gène ni remise en cause, ils s’adressent comme de vrais missionnaires du prosélytisme aux ” vrais musulmans” sans jamais expliquer comment ils arrivent à les reconnaitre dans la foule. Ils ne disent jamais comment ils les choisissent et comment ils les fractionnent. Quels sont leurs critères et comment établissent-ils la grille de sélection? Quels sont leurs compétences en la matière et leurs qualifications en théologie? Sont-ils diplômés de Al Azhar, au Caire, l’une des plus prestigieuses institutions de l’islam sunnite, ou juste des intrus qui s’accaparent une autorité morale ou religieuse pour des objectifs obscurs et purement démagogiques?
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Ces nouveaux intrus n’ont ni les qualifications ni l’autorité morale pour s’improviser non seulement, des représentants mais pire encore, ils se donnent le droit ultime de choisir et de décider unilatéralement qui est ou qui n’est pas musulman. Bon ou mauvais, vrai ou faux!
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À elle seule, la lutte contre l’islamophobie ne peut être l’exutoire pour justifier et légitimer les pléthoriques existences des faux prophètes ni des leaders autoproclamés.
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Toi aussi, tu peux apprendre un demi verset, deux quarts de Hadith et embarquer dans n’importe quel débat en levant dans l’air le drapeau des communautés que tu réduiras dans le vocable “Oumma”, devenant un nouveau Chef, une autorité morale .
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Majid Blal, Sherbrooke le 3 décembre 2014