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Maroc/Cinéma : « Le Bleu du Caftan » de Maryam Touzani, un film qui ose

Vues d'Afrique

Par Hicham Alaoui

Le long métrage « Le Bleu du Caftan », de la réalisatrice Maryam Touzani, plonge le public dans l’univers d’un atelier de couture situé dans les ruelles de la médina de Salé (banlieue de Rabat), au Maroc. Il dépeint avec délicatesse l’histoire d’amour d’un couple atypique et les désirs secrets d’un homme.

Le film, projeté dans le cadre de la 23ème édition du Festival du film de Tanger (du 27 octobre au 4 novembre 2023), raconte l’histoire d’Halim, marié de longue date à Mina, avec qui il dirige une entreprise de confection traditionnelle. magasin. caftans dans la médina de Salé. Le couple a toujours vécu avec le secret d’Halim, son homosexualité qu’il a appris à taire. La maladie de Mina et l’arrivée d’un jeune apprenti vont bouleverser cet équilibre. Unis dans leur amour, chacun aidera l’autre à affronter ses peurs.

« C’est un film sur l’amour sous toutes ses formes. Il n’y a pas qu’une seule façon d’aimer. C’est important de pouvoir entendre cela, de pouvoir voir cela », a déclaré à l’APA la réalisatrice Maryam Touzani.

A travers ces trois personnages, « j’avais envie de parler de toutes ces possibilités de l’amour. Un amour entre une femme et un homme, entre un homme et une femme et entre un homme et un autre. Selon elle, « il est essentiel d’évoquer la beauté de l’amour tel qu’il est et sans jugement. Le film plonge dans la vie intime de ces personnages.

Halim et Mina, propriétaires d’une boutique de caftans (tuniques longues exclusivement portées par les femmes), prospèrent dans leur commerce. Le succès de leur boutique les amène à embaucher un nouvel apprenti, Youssef. Cependant, l’arrivée de ce jeune homme va réveiller chez Halim des sentiments longtemps enfouis. Au même moment, Mina tombe gravement malade, ce qui la pousse à remettre en question sa relation avec son mari.

Pour Maryam Touzani, l’inspiration de ce film vient d’une rencontre avec un coiffeur dans la médina de Salé. Même si les conversations ne concernent pas des sujets intimes, le réalisateur sent qu’il y a quelque chose de refoulé en lui. Cet homme deviendra plus tard l’inspirateur du personnage Halim. Malgré sa relation de vingt-cinq ans avec sa femme et son amour profond pour elle, Halim éprouve des désirs pour d’autres hommes.

«Je voulais qu’il fasse preuve d’empathie et qu’il soit capable de comprendre les autres. Tous les amours sont égaux et je pense qu’il est essentiel d’en parler et d’avoir un débat sain et qu’on arrête de faire semblant et de se cacher”, a-t-elle expliqué

A travers « Le Bleu du Caftan », Maryam Touzani explore les liens entre ses personnages ainsi que ceux entre le passé et le présent. Elle exprime également son affection pour les traditions, soulignant à la fois leur beauté et leur potentiel d’étouffement.

Le film est porté par des performances remarquables, notamment celle de l’actrice Lubna Azabal, qui incarne Mina et a subi une transformation physique pour refléter la dégradation de sa santé. L’approche réaliste est renforcée par l’embauche d’un nutritionniste pour guider la perte de poids de l’actrice.

Les acteurs masculins ne sont pas en reste, et le choix d’Ayoub Missioui pour le rôle de Youssef, l’apprenti amoureux, est plébiscité pour sa maturité et son admirable interprétation du personnage.

Lors de la séance de débat qui a suivi la projection du film, les réactions des professionnels du cinéma, des critiques et journalistes présents, ainsi que du public ont été mêlées entre ceux qui ont apprécié l’audace de cette œuvre cinématographique qui a su aborder un sujet tabou dans la société marocaine. , qui est l’homosexualité. D’autres ont estimé que cet opus portait atteinte aux valeurs d’une société conservatrice en portant un coup dur à travers des scènes qualifiées d’« obscènes » et d’« ignobles ». Ils s’interrogent également sur l’intérêt du sujet retenu par le film et ses fondements dans un contexte d’acceptation, de refus et d’occultation d’un phénomène sociétal.

En abordant le thème de l’amour homosexuel, « Le Bleu du Caftan » affronte des sujets tabous au sein de la société marocaine. Maryam Touzani croit en la capacité du cinéma à susciter des émotions et à changer les mentalités.

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