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Il vaut mieux vivre comme un lion pendant un jour plutôt que vivre comme un mouton pendant un siècle!

Fatiha-Salsabil

Vues d'Afrique
Abderrahim khouibaba

Je mentirais à peine si je disais que ce proverbe, italien ou africain, a été fait sur mesure pour lui.

Lui dont les Je refuse résonnent encore dans ma tête et peut-être aussi dans celle de ce ministre surpris par ce jeune lion sorti de nulle part qui, devant des centaines de RME réunis à Rabat pour fêter le Trône en 1996, n’a pas voulu jouer la partition qu’il lui avait réservé dans une supercherie bien orchestrée. Faussement offusquée, une centaine de moutons quitta la salle en guise de protestation courtisane. Moi, j’y revins avec le sourire…

Lui qui, à peine sorti de l’étau officiel, a spontanément prêté voix forte à une inconnue prise à parti par une trentaine d’entre-eux dans le hall feutré du 5 étoiles qui les accueillait. Les plus galeux, les plus frileux à l’idée de voir la fusion de ces deux libertés d’expression contaminer les autres invité-e-s. Des RME encore sous le joug de leurs bas-fonds de commerce, surtout européens, basés sur la peur du gendarme fantôme marocain. Leur crainte s’avéra bel et bien fondée…

De ce moment surréaliste, je retiens la pression du dos de cet inconnu contre le mien. L’un prenant appui sur l’autre pour répondre, du tac au tac, à deux groupes d’hommes identiquement formatés. De ce moment intense, je retiens l’image d’une femme et d’un homme épris de liberté et d’égalité cernés par des apôtres zélés de la censure ou du patriarcat ou des deux à la fois. Les uns ont quasi disparu, les autres se sont bien reproduits…

Alertés par les tons montants et les échanges de propos virulents, des officiels transformèrent, habilement, notre speakers’corner improvisé en tables de conversation. En libérant, formellement, la parole de la majorité silencieuse restée spectatrice, ils répudiaient publiquement tous les bêli-oui-oui. Lui, il compris plus tard, chez eux, qu’ils n’avaient pas tous bu leur frustration jusqu’à la lie…

Battant le fer, tant qu’il était chaud, de la liberté d’expression marocaine révélée à des RME, il lança le débat sur un thème encore plus délicat, à l’époque, que le premier. Celui de la liberté de la presse au Maroc. Existante ou en devenir pour les un-e-s, inexistante et improbable pour les autres. Il trancha en présentant son bébé fraîchement sorti de presse canadienne: le tout premier numéro de Maghreb Observateur, véritable courroie de transmission, indépendante et inédite, offerte à toutes les formes d’expression de RME. Je devins sa porte d’entrée sur le vieux continent…

Bien que trop rarement utilisé dans les relations interpersonnelles, le sentiment de fierté sied parfaitement à la relation qui me lie à cet homme depuis un quart de siècle. Lui qui, malgré une popularité, des succès et honneurs en tous genres, n’a jamais oublié d’où il venait. Lui qui, de toutes ses cartes, persiste à préférer sa carte de presse.

A ces deux fondamentaux qui sont les siens, je me dois de lui reconnaître également un indéniable respect de l’autre. Qu’il fasse partie des dits petits ou grands de ce monde. Une sensibilité dépourvue de sensiblerie et une gentillesse qu’il laisse, parfois, prénommer Achille. Un souci de la parole donnée, un sens de l’honnêteté et une soif de justice qui n’ont d’égal que l’acharnement viscéral qu’il déploie pour contrer quiconque piétinerait ces/ses valeurs. Des formes d’intelligence en perpétuel mouvement, un esprit innovant et avant-gardiste en milieux d’affaires, journalistiques et culturels canado-marocains. Une capacité, trop souvent sabotée ou sabordée, à utiliser les leviers du libéralisme pour arriver à ses fins sociales au Maroc.

A ces quelques traits de son caractère fort, je me dois d’ajouter que cet homme n’est pas l’idéal. Ni pour lui-même, lui qui laisse ses démons et sa recherche de paradis, perdus ou à trouver, vampiriser sa paix intérieure. Ni pour toute personne qui viendrait à le trahir ou à utiliser un pouvoir, un statut pour nuire à autrui. Contre elle, ce partisan pur et dur du It’s not over until I win utilisera, sans hésiter, sa redoutable intelligence pratique.

L’homme qui ne se cache pas derrière ce portrait est Abderahim Khouibaba. Son chemin et le mien se complaisent à se croiser lors de moments importants de nos vies et à se décroiser, en douceur, au nom de l’une ou l’autre de nos inébranlables opinions.

Actuellement, nous sommes en période de croisement autour de Maghreb Observateur. Son bébé qui a bien grandi. Et, parce que Abderahim reprend sa plume et ses enquêtes, je sais qu’il sait que, même vieillissant, un lion reste un lion.

Fatiha-Salsabil

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