Par : Houria Zaari

Mis à jour le 12-11-2023
Les maisons mitoyennes de la médina de Fès, adossées, et appuyées, les unes contre les autres, étaient tellement accolées, que l’on se déplaçait, de terrasse en terrasse comme si on marchait dans la rue.
il s’en tramait des aventures pas très catholiques, sur ces terrasses. On y étendait le linge, on y prenait le soleil, on y mettait à sécher les olives noires débarrassées de leur amertume, les épaisses lanières de viande, macérées dans une marinade d’ail de graines de coriandre et de sel pilés ( l’khliē ), avant le boucanage. Et surtout, surtout on en profitait pour fricoter bien d’autres choses.
Le printemps, l’été, étant les saisons les plus propices, et les plus prisées, pour ces pratiques, les jeunes gens, de même sexe, de sexe opposé en profitaient pour nouer des intrigues qui défrayaient la chronique dans la clandestinité. Et les amours illicites entre eux, sur les toits, faisaient scandale et faisaient jaser.
Des amours ancillaires, étaient tissées au sein même des maisons.
A l’époque, on acquérait des esclaves noires au souk ( marché aux esclaves ) pour les tâches ménagères, dada ( femme à tout faire même à se glisser à l’occasion, dans le lit du mari.) et le maître de céans s’arrogeait le droit de cuissage. Puis lorsque la jeune esclave tombait enceinte, il l’épousait tout bonnement, ( notre religion, lui octroyant le droit d’avoir jusqu’à quatre épouses.) Elle était affranchie par son maître et en tant que telle, bénéficiait au même titre que la première femme, du même statut, et des mêmes droits.
Nombre de familles fassies, comptent encore aujourd’hui, des demi- frères, issus de ces mixages.
Puis les moeurs évoluant, les parents compréhensifs, indulgents, et débonnaires, aménagèrent sous les combles, des garçonnières, ( masriya ) aux fils aînés en priorité; Droit d’aînesse oblige, pour faire passer leurs frasques, de façon officieuse, à l’abri loin des regards indiscrets, et des terrasses.
C’est qu’à l ‘époque, deux, voire trois ménages vivaient dans le même riad qui comprenait deux étages, et de nombreuses pièces spacieuses avec une multitude, de coins et de recoins. Elles cohabitaient le plus aisément, du monde partageant avec satisfaction, et délectation, les mêmes repas, les mêmes servantes, les mêmes tâches ménagères, les fêtes, je dirais presque et tout le reste.
Que de manigances vécues!!!…
Il faut dire, que les femmes fassies des générations passées, étaient plus complaisantes, plus magnanimes, et qu’en dépit de s’entr’aider elles étaient plus philosophes.
Non pas qu’elles fussent vertueuses, elles étaient bien au parfum, des moeurs dissolues à outrance, de leurs chers et tendres époux. Et pour cela elles le leur rendaient bien. Elles s’en donnaient même à coeur joie avec pour terrain de jeux: les terrasses, et avec la complicité de confidentes, ou de servantes accommodantes.
Elles portaient un regard perspicace, et pertinent, sur la société de l’époque, analysant avec finesse, justesse, et condescendance les moeurs de leur temps.
Bien leur en prit. Elles vécurent heureuses.
Houriya Zaari
Excellente description des terrasses des maisons de fés qui me remet en memoire de delicieuses histoires contées par ma grand-mere ou entendues chez de vieilles tantes paternelles comme maternelles…Merci hourya Zaari de cet article si bien ecrit par une connaisseuse confirmée de certains aspects meconnus de la vie sociale de la sociéte Fassie.
Bonjour
Pas catholique, oui mais musulman.
Donc le droit de se marier et ne pas ….