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Alors que les Algériens, les Tunisiens, les Sénégalais, et bien d’autres, vivant à l’étranger peuvent participer aux scrutins organisés dans leur pays d’origine, les Marocains en sont toujours privés.

Mise à jour le 04-12-2023

Vues d'Afrique

Maroc : la diaspora privée de vote, jusqu’à quand ?

Alors que les Algériens, les Tunisiens ou les Sénégalais Mauritaniens, Égyptiens.., vivant à l’étranger peuvent participer aux scrutins organisés dans leur pays d’origine, les Marocains en sont toujours empêchés. Les élections générales du 8 septembre auraient été pourtant l’occasion de mettre fin à cette anomalie qui touche plus de 6 millions d’électeurs potentiels.

Le Maroc qui a lancé la marche verte, grande marche pacifique partie du royaume vers le Sahara sous colonisation espagnole en 1975. Le Maroc qui a organisé la COP22 à Marrakech en novembre 2016 et réuni 196 pays, des ONG, des syndicats, des scientifiques ainsi que des médias du monde entier. Le Maroc qui a su mener des projets d’envergure comme le port de Tanger-MED, le train à grande vitesse Al-Boraq, le complexe Noor – l’un des plus grands parcs solaires au monde – et bientôt un hub financier de référence en Afrique. Le Maroc qui organisera la prochaine coupe d’Afrique, le maroc qui sera le hote de coupe du monde de soccer 2026. Ce Maroc, nous en sommes convaincus, est capable d’organiser des élections pour ses près de 7 millions de compatriotes résidants à l’étranger.

La nouvelle constitution adoptée en 2011 consacre le droit de vote et de candidature de tous les Marocains depuis leur pays de résidence (articles 16 et 17). Pourtant, prés de 20 ans plus tard, ce droit constitutionnel n’est toujours pas inscrit dans les lois électorales. Le motif avancé par les parties prenantes est surprenant puisque se trouvent invoquées « les modalités de vote et l’application de ce droit », qui poseraient « problème ».

Ce motif nous interpelle d’autant plus que nos voisins algériens et tunisiens tout autant que plusieurs pays subsahariens, tel le Sénégal, ont organisé des scrutins dans le pays de résidence de leurs ressortissants !

Aberration

Beaucoup de discours politiques vantent l’apport multiforme des MRE [Marocains résidant à l’étranger] dans l’économie nationale, notamment à travers le développement de la coopération internationale entre les territoires marocains et leur pays de résidence ou encore via la solidarité directe avec les familles restées au pays. Pourtant, ces MRE tant vantés dans les discours ne peuvent toujours pas choisir leurs représentants au sein du Parlement.

Outre que ce déni de droits vis-à-vis de la diaspora relève de l’aberration dans une période où les relations internationales et la diplomatie des territoires constituent des armes essentielles utilisées par toutes les grandes nations, les partis politiques marocains se privent de personnalités, de compétences, de potentialités qui pourraient renforcer la place du Maroc dans le concert des nations et les réseaux d’influence du pays à l’échelle internationale.

C’EST UNE ERREUR HISTORIQUE DE CONTINUER À ÉCARTER LES MRE

Nul n’ignore que la derniére élection générale s’est déroulé au Maroc. Les grand oubliés, encore une fois, les millions de Marocains d’Europe, des Amériques, d’Asie, du Moyen-Orient…, toujours privés de représentation parlementaire propre et astreints à être représentés pour pouvoir voter par procuration.

La normalisation des relations diplomatiques entre le Maroc et Israël – pays où l’on compte près de 800 000 Juifs marocains majoritairement attachés à leur pays d’origine –, n’aurait-on pas dû saisir l’occasion pour concrétiser les droits de « pleine citoyenneté » reconnus par la Constitution à tous les Marocains, quel que soit leur lieu de résidence sur le globe ?

Les enjeux des dernières élections dépassaient largement le territoire national et c’est une erreur historique de continuer à écarter les MRE.

Le manque flagrant de considération qui s’est manifesté dans cette élection aurait sans doute été nié si le bilan de vingt ans de Constitution sur les questions diasporiques n’était pas aussi éloquent à lui tout seul. Ce désir de participation effective de la diaspora aux décisions majeures de son pays fait écho à des revendications et des combats portés de manière régulière depuis plus de trente ans. Les MRE souhaitent contribuer par la réflexion, mais également par l’action, à l’avènement d’un Maroc meilleur.

Nous le savons, la tentation est politiquement forte de réduire cette nouvelle demande à un fait mineur et de se « contenter » encore de discours creux sans lendemain.

Égalité de traitement

Mais c’est un autre chemin que nous vous demandons de prendre. Ce que nous vous demandons, c’est que soit enfin ouvert le chantier d’une mise à plat du cadre juridique et institutionnel pour la mise en œuvre concrète du droit des membres de la diaspora à être élus et représentés depuis des circonscriptions électorales qui épousent leur lieu de résidence.

Nous vous demandons d’assurer l’égalité de traitement des citoyens marocains en toutes circonstances, en conformité avec la loi et la Constitution. Si cela n’est malheureusement pas le cas, c’est en raison d’archaïsmes tenaces, de pratiques hiérarchiques et de discours institutionnels qu’il faudra profondément interroger.

Cette situation injuste ne se traitera pas en la réduisant à un caprice ou à des démarches individuelles isolées. Nous vous demandons d’indiquer les voies que vous souhaitez emprunter pour supprimer ce désordre et dessiner les modalités de dialogue et d’élaboration de propositions visant à assurer la représentation effective de la diaspora. Ne doutez pas qu’au-delà même des signataires du présent texte, beaucoup d’acteurs de la diaspora sont prêts à participer à cet effort institutionnel crucial.

Nous demandons une recomposition du Conseil de la communauté marocaine à l’étranger (CCME) pour en faire une instance démocratique et représentative des MRE, comme il est prévu dans ses statuts et son dahir [décret royal] constitutif. Cette mise à plat doit également concerner le Conseil économique et social, ainsi que le prévoit la Constitution.

Répondre positivement à cette interpellation ne serait pas un signe de faiblesse mais le signe d’une démocratie capable de lucidité et de maturité sur un sujet où elles ont fait cruellement défaut depuis trop longtemps.

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